Retour sur deux folles soirées, les vendredi 31 janvier et samedi 1er février 2025, dans des concerts « tributes » très réussis. Morceaux cultes, artistes talentueux, ambiance joyeuse… Moi qui m’étais toujours demandé qui pouvait bien aller voir ce genre de spectacles de reprises, j’ai eu ma réponse : lorsque le show est de qualité, ces chansons mythiques transcendent le charisme de leurs interprètes originaux, aussi légendaires soient-ils. Et nous transportent, pour une soirée, dans les souvenirs, les émotions, et un bonheur général d’autant plus réconfortant qu’il est partagé avec d’autres.
Pop Legends : The Rocket Man (Elton John) et Mania (ABBA)
Cela faisait un moment que j’étais curieuse de découvrir Jimmy Love, le « tribute artist » de Sir Elton John dont, comme chacun sait, je suis fan (lire ici ou ici) depuis plus de 30 ans (eh oui ma bonne dame). Je ne vais pas refaire toute l’histoire de ma passion eltonienne mais, en résumé, j’ai usé mes oreilles sur ses albums et ses albums sur mes oreilles, j’ai sué sur mon piano pour apprendre fastidieusement quelques uns de ses morceaux, j’ai explosé mes maigres économies pour aller le voir en concert 8 fois (enfin, une fois, Cynthia m’a invitée 🫶 lire ici et ici), j’ai failli briser une amitié pour lui, j’ai rêvé de lui, j’ai espéré le rencontrer, etc. Bref, bien que je ne sois pas allée jusqu’à le suivre en tournée au bout du monde ou planter ma tente devant Bercy quinze jours avant sa venue, tout fan un peu exalté comme moi aura compris les sentiments douloureusement intenses qui m’ont traversée durant ces trente années d’amour et d’admiration. Comment continuer à vivre sereinement sans la perspective d’un nouveau concert, maintenant qu’il a pris sa retraite ?
Me voici donc, ce vendredi 31 janvier, dans le décor magique du Cirque d’Hiver Bouglione, un peu craintive et dubitative.
Première bonne surprise : de ma place en hauteur, Jimmy Love fait physiquement le job. Ce n’est bien sûr pas le principal critère qui me fera l’applaudir mais c’est amusant. Un peu plus fringant qu’Elton (plus jeune aussi), corpulence et coiffure (perruque ?) assez similaires, costume à épaulettes à plumes, canotier période « I’m still standing »… Accompagné de 3 musiciens et d’une choriste, sosie de Taylor Swift, il ouvre la première partie de soirée avec « Rocket Man »… hélas rapidement tronquée. Heureusement, les autres chansons seront pour la plupart chantées en entier.
Deuxième soulagement : la voix est plutôt agréable. Personnellement, j’ai un attachement particulier à la voix d’Elton des 90’s jusqu’à aujourd’hui, celle qui est devenue très grave, parfois rauque, avec un beau vibrato bas et profond – mais peut-être parce que c’est celle que j’ai connue en premier. La voix de Jimmy Love correspondrait plutôt à la période autour des 70’s-80’s avec un falsetto ou une voix de tête plus aiguë, qu’il utilise d’ailleurs là où Elton ne l’utilise pas forcément. Il ne s’agit donc pas d’une copie vocale ou d’une imitation parfaite, mais d’une appropriation personnelle « dans le style de » qui, parfois, s’approche assez du grain de voix d’Elton. L’accent ou la prononciation m’a parfois un peu surprise, bien qu’il soit Anglais : j’ai eu l’impression qu’il y avait des changements de mots ou paroles. Rien néanmoins qui choquera le public non maniaque.
Pour mon plus grand plaisir, Jimmy a interprété quelques chansons que je n’avais plus entendues en live depuis des lustres : « Pinball Wizard » (initialement des Who), « Nikita », « Don’t Go Breaking My Heart » en duo avec Taylor, « Can You Feel the Love Tonight » (hélas coupée) ou « Circle of Life », très bien… Le reste du set ressemble aux derniers concerts d’Elton avec les sempiternels mais toujours efficaces « Bennie and The Jets », « I’m Still Standing », « The Bitch Is Back » ou « Crocodile Rock » – et même l’horrible « Cold Heart » (ce truc immonde avec Dua Lipa). Cela dit, cela actualise le répertoire sans enfermer Elton dans le formol de ses vieux tubes, donc pourquoi pas.
Petit bémol très regrettable pour moi : une propension à jouer un peu trop rapidement et couper de façon frustrante les ballades : chanter la moitié de « Your Song » avec autant de pauses suspendues, sorry but nooooo! – et idem pour « Can You Feel… » : sloooow doooown, please.


Au final, les musiciens accompagnateurs sont solides, la performance générale est bonne, même si, pour ma part, j’aurais aimé un peu plus d’audace et de solos au piano. Peut-être, dans la version complète du show, Jimmy chante-t-il toutes les chansons en entier et se permet-il des improvisations pianistiques like Elton ? Ce soir-là, il fallait ensuite laisser place à Mania, le tribute band d’ABBA donc je suis restée un peu sur ma faim, mais le public semblait plutôt ravi et conquis à la fin de la prestation de Jimmy Love. J’espère le revoir un jour et l’entendre chanter, pourquoi pas, « The One », « A Good Heart », « Levon », « Believe »…
Après l’entracte, c’est donc l’un des innombrables « tribute bands » consacrés à ABBA, Mania, qui investit la scène. Le public, réchauffé par les succès d’Elton, est, dès l’entrée sur scène des chanteurs et musiciens sur « Waterloo », déjà en partie debout.
J’aime bien ABBA, mais je n’avais jamais pris la peine d’écouter particulièrement leur musique, en dehors des soirées, des karaokés ou du film Muriel’s Wedding (en revanche, je n’ai jamais vu Mamma Mia). Eh bien, je dois dire que j’ai redécouvert ce soir-là, à travers une avalanche impressionnante de hits (« Voulez-Vous », « Money Money Money », « Mamma Mia », « Fernando », « Take a Chance On Me », « Chiquitita », « The Winner Takes It All », « Gimme Gimme Gimme! », « Dancing Queen » et j’en passe), tout le charme de leurs arrangements disco-pop ciselés autour des magnifiques harmonies des deux chanteuses. Un son très reconnaissable, des mélodies immédiatement accrocheuses, des costumes et une gestuelle dansée à la fois kitsch et accueillants, comme si l’on entrait dans une espèce de nouvelle dimension futuristo-new age en communion avec les éléments (ne me demandez pas, c’est l’image que le concert m’a inspirée).
Ici encore, d’excellents musiciens, dont un guitariste en pleine forme, ont mis le feu au Cirque d’Hiver : la moitié de la salle était debout pour danser quasiment du début à la fin. Un fantastique moment que je recommande à tout fan d’ABBA évidemment, mais également à ceux qui connaissent moins mais sont amateurs de pop. Impossible de rester assis en écoutant ça ! À vos agendas, ils seront de retour en France en octobre 2025 !

Les adieux des Cochons dans l’Espace à la Cigale
Le lendemain soir, samedi 1er février, rendez-vous à La Cigale, pour le concert d’un groupe aussi mythique que ceux qu’ils reprennent. Les Cochons dans l’Espace ambiancent les soirées parisiennes depuis quelques décennies et Cynthia, qui les a vus en concert plusieurs fois, m’en parlait déjà au début des années 2000. Malheureusement, cette première fois pour moi sera a priori la dernière aussi, puisque j’ai cru comprendre qu’ils raccrochaient guitares, basse et batteries après 35 ans de carrière (ou 30 si l’on se réfère à l’affiche de ce concert). La tristesse !
Mais la joie d’avoir vécu une soirée d’anthologie ! Un groupe amoureux fou du rock qui reprend avec puissance et intensité des standards : des Stones à AC/DC en passant par Midnight Oil, Springsteen, Bowie, Police, Led Zep… Dès les premières notes de « We Won’t Get Fooled Again » de The Who, mon amie et moi avons commencé à danser, pour ne nous arrêter que près de trois heures plus tard, alors que La Cigale tentait vainement de stopper le concert en coupant le micro de la chanteuse, éteignant l’écran derrière la scène et fermant le rideau, tandis que le public toujours en folie – et sûrement ému – chantait à tue-tête « Highway to Hell » en essayant d’attraper au vol mediators et balles lancés par Pascal le guitariste.
Ce fut un set formidable qui m’a fait comprendre l’enthousiasme de Cynthia toutes ces années. Les musiciens étaient encore une fois démentiels, les solos de guitare particulièrement fabuleux. Parmi mes moments préférés : « Enjoy the Silence » de Depeche Mode, l’envoûtant « Comfortably Numb » de Pink Floyd (LE « groupe mou ») et « Cortez The Killer » de Neil Young – qui m’a cependant déconnectée de l’ambiance initialement déjantée, et après lequel j’ai eu un peu de mal à me remettre dedans, tellement je planais avec les longues nappes de guitare. J’ai également adoré le medley dansant du milieu mixant Gala et d’autres morceaux de rock ainsi que l’invitée surprise, Patricia Kaas, sur deux morceaux qui lui allaient ma foi plutôt bien : « Rebel Yell » de Billy Idol et « The Power of Love » de Frankie Goes to Hollywood. Même la venue saugrenue de Cloclo et ses Clodettes m’a fait rire et surtout danser au son de « Alexandrie Alexandra », toujours un grand classique malgré ce qu’on peut penser du chanteur aujourd’hui.



J’ai un peu moins adhéré à l’humour en-dessous de la ceinture très centré sur l’arrière-train, mais à vrai dire, j’ai à peine écouté les blagues tellement j’étais dans la musique. La bassiste m’a beaucoup impressionnée, une présence simple mais sans laquelle le groupe ne serait pas ce qu’il est. Tout cela transpirait la générosité, l’amour de la musique plus fort que tout, une vie de passion et d’anticonformisme. C’était beau et fou, j’ai été aussi touchée que ceux qui les suivaient depuis des années.
Allez, prochaine date du genre, So Floyd au Dôme de Paris, le 11 mars 2025 ?