Après Mammuth et Le Grand Soir, films originaux qui échappent aux conventions d’un cinéma français parfois un peu ronronnant, Delépine et Kervern réitèrent avec un film qui en déroutera certains, non tellement par son sujet, mais peut-être parce qu’il repose essentiellement sur un seul acteur qui n’en est pas un, puisqu’il s’agit de l’écrivain Houellebecq qui occupe l’écran quasiment en permanence, seul.
On a déjà vu l’écrivain à la télévision, traîner sa silhouette déglinguée, en parka crado face à BHL, dandy à chemise blanche. L’histrion nous agaçait, mais l’acteur est époustouflant. Avec son visage ravagé, son torse maigre (il rappelle le Céline de la fin), avec sa moue sur une mâchoire qu’on devine sans dents, il incarne un Français moyen, gentil mari, gentil père de famille qui fume, avachi sur son canapé, en essorant les dernières gouttes d’un bib de vin, qui évite toute discussion, qui fuit tout conflit : quelques plans et le ton est donné, c’est l’univers de Kervern et Délépine, une sorte de réalisme déjanté… Jusqu’au jour où il s’en va pour de bon.
Il enfourche son vélo, vêtu d’une improbable tenue de cycliste. Il est un peu ridicule, il le sait, mais ses enfants lui ont offerte, alors il la met. Et le Mélancolique pédale, pédale, dans le soleil, tout en haut de la montagne, là où la mort ne peut être que belle. Mais veut-il vraiment en finir ? Il est fatigué de sa vie, mais difficile de prendre au sérieux ce désespéré, pas plus qu’on ne peut prendre au sérieux ce sportif, aux jambes en allumettes, essoufflé, qui fume en tenant sa cigarette entre le majeur et l’annulaire, tantôt de la main gauche, tantôt de la main droite, méthodiquement… Il lâche le vélo, se balade et jouit enfin de sa solitude, seul au milieu d’un paysage provençal, lumineux, superbement filmé. Mais ce solitaire n’est pas tout à fait un misanthrope, quand il rencontre un simplet de village, il accepte de faire avec lui une partie de petits cyclistes. Désopilant…
C’est un film sur la condition humaine… Grandeur et Misère de l’homme. Houellebecq, en petit Pascal, contemplant son gouffre du haut de la montagne, ou en boy scout minable, n’arrivant pas à allumer un feu…
La fin du film que nous ne dévoilerons pas, reste dans la même tonalité…
Drôle de film donc, avec un drôle de titre : pourquoi en anglais ?…
Utiliser le terme en anglais a quelque chose d’ironique, appeler le film « expérience de mort imminente » eut été plus premier degré.
Pour le coup, moi, j’aurais trouvé ça assez ironique !
Sans doute ,c’est ironique. Et c’est vrai que si on retraduit ce titre en français,c’est limite ridicule…Mais ce qui m’agace, c’est que ça rencontre une mode qui consiste à ne pas traduire les titres des films américains ( sans doute imposée par des producteurs pour des raisons économiques) et pire, à donner des titre anglais à des films asiatiques ou sud américains …
Le film touche les sujets habituels de Houellebecq : le désespoir, la dépression, la banalité de la vie moderne (ou de la vie tout court), l’inutilité de l’homme contemporain et son incapacité à, par exemple, faire du feu, ce qui veut dire qu’il est juste un consommateur… Dans le film Houellebecq n’est pas exactement un acteur, il joue un de ses personnages… il se joue un peu lui-même.
C’est Houellebecq qui a écrit le scénario ? Ou c’est lui qui a tout simplement inspiré Delépine et Kervern ?
Le scénario est de Kervern/Delépine
On donne parfois des titre anglais à des films français ! (« wild side » de Sébastien Lifshitz) Et puis il y a les titres en anglais remplacés par un autre titre en anglais. Je sais que sans eux on serait tous en Germanie, mais quand même…
Oui, remplacer « Cruel intentions » en vo par « Sex intentions » en vf, par exemple, c’était brillant !!
La liste des films dans ce cas là http://www.allocine.fr/diaporamas/cinema/diaporama-18636534/31