Quelques heures avant la fin de l’exposition S’il y a lieu je pars avec vous, nous nous décidons enfin à partager l’impression moelleuse que nous en avons gardée. Le Bal (6 impasse de la Défense, 18ème arr.) qui l’a accueillie depuis le 11 septembre, est décidément bien fidèle à la définition qu’en a donnée son Président Raymond Depardon, « un lieu d’exposition, de confrontation et d’interrogation des multiples approches du réel »…
Niché dans une impasse du 18ème arrondissement, entre verdure et immeubles, le Bal pose le décor dès le trottoir : la menue terrasse à l’ambiance chaleureuse ouvre ses portes sur un espace librairie où les ouvrages dédiés à la photo sont savamment enchevêtrés. Mais ne nous égarons pas, nous sommes venus voir une expo !
Et cette exposition, c’est S’il y a lieu je pars avec vous, et a pour thème (étonnant) les autoroutes. Il est donc plus que logique qu’elle soit présentée avec le soutien de Vinci, par ailleurs mécène du Bal. Sur l’invitation du Bal, justement, 5 artistes sont partis sur la route, cette route si connue, si familière, si semblable en tout point du territoire français, si ancrée dans nos mémoires. Ils sont partis et nous sommes partis avec eux.
Qu’il s’agisse de Sophie Calle, logée dans un cabine du péage de Saint-Arnoult ; d’Alain Bublex dévoilant des paysages dont on ne sait s’ils sont réels ou fictionnels – nous poussant ainsi à nous poser la même question sur nos souvenirs qui affleurent ; de Stéphane Couturier, réinventant les paysages tout en les déconstruisant ; d’Antoine d’Agata, parti sur les traces de ses origines entre Paris, Marseille, Nice et jusqu’à la frontière italienne, et qui fait des aires et des motels d’autoroutes les seuls et angoissants points de repère de sa quête ; ou enfin de Julien Magre, narrant visuellement une sorte de road trip familial, et s’appuyant avec justesse sur les expressions mi-enjouées mi-inquiètes de ses deux fillettes.
Une petite heure passée à circuler entre les photos (et quelques vidéos) et à sentir remonter en soi les souvenirs de longues traversées en voiture, à travers une route infinie, nous menant sans hésitation vers un ailleurs que l’on espère autant qu’on l’appréhende. Prendre la route pour cheminer ou prendre la route pour arriver ? Prendre la route de toute façon et s’enrichir du flot des possibles…