14 décembre 2024

Quand MarCel rencontre Gotlib

Dès que les affiches sont apparues dans les rues de Paris, on a piaffé : « oh viens, viens, on va voir l’expo Gotlib ! J’me rappelle, je lisais les Dingodossiers dans les toilettes chez mes parents ! ». Du 12 mars au 20 juillet 2014, grâce au Musée d’Art et d’Histoire du Judaïsme, nous avons donc la possibilité de retomber une ou deux heures en enfance à la découverte de l’exposition « Les mondes de Gotlib ». Alors, un dimanche mi-froid mi-chaud, nous avons remonté un peu le temps, le nôtre, et celui de Marcel. Coïncidence ?

Pendant presque 5 mois, près de 200 planches originales de bande dessinée, des photos, des images, des archives audiovisuelles retraceront sur 400 (trop) petits mètres carrés la vie personnelle, artistique, et même militante de Marcel Gotlieb, dit Gotlib. On est rentré dans la salle la mémoire excitée, débordant de Bougret et Charolles, de Superdupont, de Isaac Newton, de Tarass Boulba et de Hamlet.

Dès les premières secondes, une émotion enfantine émerge à la vision des traits, des bulles, des mouvements, des lignes d’écriture aussi ; une écriture si particulière, dont l’exposition nous apprend que Gotlib lui a porté une attention tout aussi importante qu’aux dessins. Mais, rapidement, on est tiraillé entre l’envie de sourire devant les personnages grimaçant et absurdes, et le poids de l’histoire personnelle dramatique de Gotlib. Parce que Marcel est un fils d’immigrés juifs. Il a grandi dans le 18ème arrondissement de Paris mais a dû fuir la capitale et être caché dans une famille de paysans pour échapper à la persécution de la France occupée. Son père, arrêté par la police française en septembre 1942 puis interné à Drancy, sera assassiné à Buchenwald en 1945, quelques jours à peine avant la chute du IIIème Reich. Sa judéité, Gotlib n’en fera jamais grand cas, revendiquant plutôt une sorte d’athéisme doux, même s’il l’a récemment et sobrement racontée dans son autobiographie J’existe, je me suis rencontré, parue aux éditions Dargaud. Pour autant, il a été marqué profondément, durablement. Et certaines planches laissent transparaître l’impact sourd des événements sur le jeune enfant qu’il était.

La progression dans l’exposition est chronologique tout autant que thématique. On chemine de l’aventure individuelle à l’aventure collective, de celle de l’homme à celle de l’artiste. Du journal Vaillant, à Pilote et aux Dingodossiers créés avec René Goscinny, en passant par l’épisode Echo des Savanes avec Claire Brétecher et Nikita Mandryka, mais également par Fluide Glacial. Des Monthy Mythons, aux Marx Brothers et à Jerome K. Jerome. De Gai Luron, Nanar et Jujube, aux « petits miquets ».

De nombreuses planches grinçantes, mélanges d’humour noir, de mélancolie, d’autoportraits, de personnages aussi attendrissants que ridicules, nous ravissent et nous frustrent. Parce que, enfin, chez Gotlib, il faut lire et regarder. Il faut du temps et du confort pour saisir les planches dans leur entièreté, pour voir les minuscules détails qui jalonnent les dessins. Big up à Madame la coccinelle !

Et pour cela, l’exposition n’est malheureusement pas optimale. Peu de lumière, peu d’espace, des attroupements devant des accrochages originaux donc petits donc assez peu lisibles. La petite taupe que je suis a fini par baisser les bras en se disant : « bof, au final, je serais mieux sur mon canapé avec une bd dans les mains ». On est un peu ému, et puis un peu déçu. Enfin, on se marre quand même…

Pour en savoir plus :

Marie

J'aime prendre le train, lire et marcher en même temps, manger des gâteaux chinois au soja achetés dans un magasin douteux de Belleville, cueillir des mûres, lire des histoires de princesse à mes princesses, lire des histoires de prince à mon prince, zoner dans les boutiques de musée, dénicher des aimants de frigos ringards à la fin des voyages, écouter Glenn Gould et Nigel Kennedy, faire du vélo en jupe avec le vent de face…

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2 réflexions sur « Quand MarCel rencontre Gotlib »

  1. Waouh! Dans les toilettes, vraiment? Gotlib, je connaissais par coeur. A la même époque-je pense- j’étais un lecteur assidu le « L’os à moelle », Pierre fac. Là, faut fouiller!!!

  2. C’est toujours un peu la même chose, les expos sur la bd ou sur un auteur de bd c’est jamais très folichon. En général, on a surtout des planches grand format, c’est un peu court. Par contre, pour ma part j’ai trouvé l’installation plutôt correct, on est loin de l’abomination de l’expo Reiser à Beaubourg. Mais ça reste pas terrible c’est sûr.

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