C’est l’un des spectacles feel good de l’année, à ne pas rater, surtout si vous aimez les chansons sentimentales option variété française, tendance années 80, parfum kitsch. Avec pour fil conducteur une chanson de Laurent Voulzy, qui décline les différents états de l’amour (« Mon premier, c’est désir… » : vous l’avez ?) , les Divalala, acrobates vocales pailletées poly-gammes, nous entraînent sans transition des moiteurs féminines Bashungiennes aux moulins du cœur de Michel Legrand en passant par l’ouragan de Stéphanie de Monaco ou les souvenirs, souvenirs de Johnny. Le tout, a cappella ! Et c’est bien plus drôle que le chant grégorien !
Les Divalala, c’est un trio composé d’Angélique Fridblatt, Gabrielle Laurens et Marion Lépine, trois chanteuses aux capacités vocales complémentaires, amoureuses de la chanson et la variété françaises, qui s’amusent à les reprendre, les détourner, les remixer pour nous les révéler sous un jour nouveau. Leur particularité : tout interpréter à voix nues, en polyphonie, ou éventuellement avec un accompagnement instrumental minimaliste (ici : ukulélé, maracas, flûte…).
Je les avais découvertes il y a près de cinq ans avec leur deuxième spectacle, Femme Femme Femme, qui m’avait enchantée et séduite. J’étais donc ravie de les retrouver en décembre pour C’est Lalamour !… que j’ai finalement vu deux fois ! – une fois avec mon fils de 9 ans qui a beaucoup aimé et la deuxième fois, en janvier, avec une dizaine d’amis qui ne savaient pas trop dans quoi je les embarquais.
Dans cette nouvelle création, mise en scène par Freddy Viau, la scénographie s’est modernisée avec sobriété : l’ambiance autour des chansons est créée par un éclairage très réussi et surtout, des rais de leds (?) modulables très graphiques. Dans cet écrin de lumière classe, les Divalala déroulent avec une énergie incroyable (on se demande bien quand elle prennent le temps de respirer !) les quatre phases de l’amour selon Laurent Voulzy : désir, plaisir, souffrir, souvenirs. À chaque chapitre ses chansons, mêlant répertoire plus ancien (Cora Vaucaire) et très récent (Soprano), avec une prédominance, me semble-t-il, de « tubes » un peu nunuches des années 80 : « On va s’aimer » (Gilbert Montagné), « Une femme amoureuse » (Mireille Mathieu), « Quand je t’aime » (Demis Roussos), « Bouscule-moi » (Elsa) (aux paroles un peu douteuses aujourd’hui)… Mais chaque morceau est savamment ré-arrangé pour trois voix, donnant une nouvelle dimension – parfois toujours aussi hilarante – aux paroles et même aux mélodies.
Parmi les morceaux de bravoure qui m’ont impressionnée et/ou fait particulièrement rire : « Comme un ouragan » de Stéphanie de Monaco, performance extrêmement précise avec des décalages comme des échos ; « Capri, c’est fini » d’Hervé Vilard, mash-upé avec… « Le Boléro » de Ravel (ça pourrait peut-être marcher aussi avec « Non, je ne regrette rien » d’Édith Piaf ou « Et maintenant » de Gilbert Bécaud ?) ; « Destinée » de Guy Marchand, orientalisé avec percussions et youyous de circonstance ; « Les nuits d’une demoiselle 2.0 » de Jeanne Cherhal (d’après Colette Renard), à pleurer de rire. Quand à l’un des derniers morceaux, « Vie violence » de Claude Nougaro, que je ne connaissais pas du tout, il m’a scotchée par sa puissance, notamment grâce à l’utilisation d’un looper qui permet de superposer les boucles vocales, pour terminer en apothéose.
« J’écoute uniquement les chansons, parce qu’elles disent la vérité. Plus elles sont bêtes, plus elles sont vraies. D’ailleurs, elles ne sont pas bêtes. Qu’est-ce qu’elles disent ? Elle disent : « Ne me quitte pas ! », « Ton absence a brisé ma vie », ou « Je suis une maison vide sans toi », « Laisse-moi devenir l’ombre de ton ombre » ou bien « Sans amour, on n’est rien du tout »… »
La Femme d’à côté, François Truffaut
Mutines, coquines et féminines dans leurs robes glamour, les Divalala n’en oublient pas pour autant l’émotion. Une chanson sur les violences faites aux femmes (« Les bleus » de Serge Gainsbourg, chantée par Régine) fera taire même ceux qui chantonnent trop fort – et faux – dans notre dos. Et puis, au final, au-delà de l’amour, c’est bien de tendresse dont il s’agit. Et le spectacle, tout ébouriffant, pétillant et euphorisant qu’il est, en est bourré, ce qui le rend, au final, aussi très touchant. S’y reconnaîtront toutes celles et ceux qui, envers et contre tout, espèrent « une autre histoire » en fredonnant secrètement des chansons sentimentales.
C’est Lalamour ! : on aime à lala folie !
Photos © Karo Kottier, Hughes Marcouyau
Pour en savoir plus :
- Les Divalala : site officiel
- Un lundi sur deux au Palais des Glaces à 20h : 24/01, 14/02, 28/02, 14/03, 28/03 puis en tournée